Archive for octobre 2009

Je réécoute THE FALL

29 octobre 2009

J’ai toujours un peu de mal à écouter certains des albums du groupe de Mark. E. Smith en entier mais la compilation ‘Totally Wired’, qui regroupe les enregistrement réalisés pour le label Rough Trade, est un petit bijou. Un concentré de morceaux punks déglingués et frénétiques traversés d’éclairs pop foutraques. Un must !

Jean Guérin – Tacet (Futura, 1971)

25 octobre 2009

Tacet

Disque étrange s’il en est, découvert au détours d’une liste d’albums favoris de je ne sais plus qui, publiée sur Pitchfork. Cela m’avait intrigué de trouver un obscur disque de musique expérimentale français dans cette liste. J’ai un peu galéré pour le trouver sur Soulseek puis par la suite en format CD. Je n’ai pas poussé le vice à m’acharner à trouver le vinyle original, je n’ai pas le budget de toute façon.

Jean Guérin est un percussionniste sur lequel je n’ai trouvé quasiment aucune information mis à part que Tacet est son unique album. En réalité la bande original de ‘B.O.F. Anatomie d’un livreur’ dont le héros est un livreur qui travaille pour un marchand de vin, ce qui explique les sonorités liquides omniprésentes sur l’album. Jean Guérin a également participé à quelques autres disques de free jazz. Si vous en savez plus sur le sujet, merci de me faire part de votre savoir. Idem, si vous avez des informations sur le label Futura sur lequel est sorti ‘Tacet’ et quelques autres albums aussi cultes qu’inconnus.

Comment décrire ‘Tacet’ ? Disons qu’il sonne comme un disque de musique électroacoustique (pensez France Culture tard le soir) à fortes consonances jazz. On n’est pas très loin non plus des territoires explorés par le krautrock (pensez plus Faust que Tangerine Dream). L’album commence sur les chapeaux de roues avec ‘Triptik 2’, le morceau le plus remarquable et impressionnant de l’album. Cela débute par une mélodie jouée au saxophone et accompagnée de bruits de bandes magnétiques manipulées. Tout s’arrête brusquement et une archaïque boîte à rythmes délivre un solo d’anthologie. D’autres percussions viennent compléter le tapis de rythmes auxquels se superposent de nouveaux éclats de trompette ainsi que d’autres sons manipulés.

‘Mixage Vert’ est l’un des morceaux les plus abstraits et profondément étranges de l’album. Il est constitué d’une succession de petits bouts de phrases musicales et de sons reliés entre eux par d’invisibles ficelles suivant un ordre dont la logique échappe, créant ainsi une sorte de récit tordu dont le sens défit l’entendement.

‘Maochat’ enchaîne sans pause. Une fois passée l’introduction constituée de stridences magnétiques apparaissant et disparaissant dans un mouvement de balancier, le jazz pointe à nouveau le bout de son nez. Lignes de basse et percussion composent un solide duo rythmique sur lequel évoluent des bruits aquatiques et des notes de trompettes façon Miles Davis chez les Snorky faisant un boeuf avec des baleines dépressives.

‘Ça va Lecomte’ s’organise autour d’un dialogue entre une basse électrique et une contrebasse qui se cherchent, s’unissent et se séparent formant ainsi des rythmes tour à tour hypnotiques ou aléatoires.

‘BM37’ est le morceau le plus court de l’album et d’une certaine manière il semble en être le résumé : deux trompettes et une darbouka passées sont à la moulinette d’une table de mixage, triturées, manipulées et modulées dans un grand fatras de bandes magnétiques coupées, collées, superposées, inversées et accélérées.

‘Interminable Hommage à Zaza’ est une suite de délires infernaux peuplés de visions surréalistes et étranges qui évoque fortement une rencontre avec un groupe de Pokémons mutants par un soir de pleine lune au fond d’un bois obscure sous l’effet de quelques substances hallucinogènes.

Les percussions reprennent leurs droits sur « Réflexion 1et2′. Le morceau s’ouvre par un rythme hypnotique teinté d’effluves tribales associé à des bruits de gouttes d’eau avant de se muer en un nouveau délire aquatique au cours duquel on peut entendre une trompette jouée sous l’eau.

‘Garb 71’, qui clôt l’album, commence de manière assez sombre par une lente dérive cosmique à laquelle se joint un rythme hypnotique à mis chemin.

‘Tacet’ est un album réellement étrange et difficile à appréhender. Heureusement pour moi, son penchant jazz m’a procuré une porte d’entrée bienvenue. Cependant cette dernière se referme rapidement et laisse face à un labyrinthe peu accueillent. L’écoute attentive est indispensable pour parcourir et trouver son chemin dans ce dédale. L’écriture de cette chronique et l’écoute plus analytique que j’ai dû effectuer m’auront permis de mieux comprendre cet album qui m’était jusqu’à présent assez hermétique. Ma patience et mes efforts ont été récompensés, mais l’exploration en profondeur ne fait que commencer.

Vous pouvez le télécharger ici, merci à Direct Waves

U.S. Maple

23 octobre 2009

J’avais presque oublié U.S. Maple, petits fils spirituels de Captain Beefheart dans les années 90.

Albert Ayler – Holy Ghost

23 octobre 2009

Albert Ayler

 

Je me souviens parfaitement du jour où j’ai écouté ce morceau pour la première fois. Durant ma pause déjeuner je suis allé faire un tour dans un magasin de CD d’occasion et je suis tombé sur ‘Live at Greenwich Village’. On ne voit pas très souvent d’album d’Albert Ayler dans les bacs d’occasions, j’ai donc tenté ma chance sachant qu’il s’agissait là d’une des grandes figures du free jazz. Une fois de retour au bureau j’ai inséré le CD dans le lecteur et j’ai appuyé sur play. J’ai été incapable de faire quoi que ce soit pendant 7 minutes 41 secondes. J’étais tétanisé, bouche bée, sous le choc. ‘Holy Ghost’ m’avait laissé K.O. Je n’avais encore jamais entendu quelque chose d’aussi terrifiant, intense et beau à la foi. J’ai peine à retranscrire l’impact du gémissement lugubre de la contrebasse, de la frénésie obsessionnelle et imprévisible de la batterie et des stridences démentielles du saxophone.

La musique d’Albert Ayler est viscérale. Elle parle aux tripes. C’est une décharge d’énergie, de violence et d’amour. L’âme, le corps et l’univers indissociables. Elle est cette énergie primaire et primitive, cette violence latente ancrée en chacun de nous qui explose en cris, pleures et hurlements extatiques, odes à la beauté du monde et de la vie. Elle recèle une part du chaos inhérent à la vie elle-même. Elle est une éruption de liberté, le jaillissement des pulsions et des sentiments libérés.

La musique d’Albert Ayler me retourne l’estomac  et me met les nerfs en pelote. C’est une expérience intense, l’une des plus uniques de l’univers de la musique. Elle va au delà de la joie ou de la tristesse. Elle est tout à la fois. Elle touche au divin, à l’illumination.

En écoute ici

Christmas Decorations – Communal Rust (Community Library, 2005)

23 octobre 2009

Communal Rust copie

 

J’ai découvert Christmas Decorations peu de temps après Fennesz et Tim Hecker. J’étais à la recherche de musiques belles et abstraite pouvant m’évoquer des paysages ou des lumières. ‘Communal Rust’ tombait à pique. Pas de saturations électroniques ici mais une musique cinématographique faite de brics et de brocs, assez organique, aux guitares et instruments à cordes très présents.

Le duo formé par Nick Forté et Steve Silverstein joue ce qui pourrait être vu comme la musique folk d’XXIIIème siècle chaviré. Field Recordings, sons électroniques et acoustiques s’enchevêtrent et il devient impossible de les différencier. Christmas Decorations compose une musique hybride à partir de fragments et de bribes qu’ils organisent et structurent tel des collages impressionnistes et minutieux.

L’album s’ouvre par ‘Upstage the Drips’ et ses belles slides guitares lancinantes accompagnées de bip bip électroniques caoutchouteux. On se croirait dans le désert traversant une ville fantôme en compagnie de Ry Cooder. Suit, ‘Closer to Cartpet’, plus rêveur avec une mélodie hypnotique et de longs échos à la dérive. ‘Twig Harpoon’ évoque ’Endless Summer’, l’atmosphère des sous-bois en plus, l’odeur du sable en moins. ‘Mice over feathers’ vient faire le liens entre les moments les plus oniriques et les plus sombres de l’album. On peut y entendre des bruits d’animaux nocturnes mêlés à des bruissements de feuilles et à la mélodie fantomatique et mystérieuse d’une flûte accompagnée de cordes pincées. Certains morceaux comme ‘Browing’ sont plus sombres et assez proches des visions de terreur d’un Svarte Greiner. Des cordes métalliques frottées lentement laissent s’échapper des sons sinistres. Des crépitements et des grésillements s’y mêlent accompagnés parfois par le bruit assourdi d’un ressac à peine modifié. Des bribes de mélodies apparaissent sporadiquement comme autant d’éclairs à travers les nuages. Le rythme est lent et la mélodie évoque une boîte à musique agonisante. ‘Clay Margins’ dans veine assez similaire semble passer une musique tribale à la moulinette de la musique industrielle. 

 ‘Communal Rust’ est un album qui fourmille de trouvailles et de détails. Cet album est une réussite et je suis étonné qu’il n’ai pas suscité un plus grand intérêt lors de sa sortie. Il semble en effet être passé entre les mailles pourtant bien serrées de la multitude de blogs présents sur internet. Peut être trop électronique pour les uns ou trop ‘folk’ pour les autres.

Christmas Decorations, Communal Rust, Community Library, 2005.

Miles Davis quintet – Freedom Jazz Dance

22 octobre 2009

Qu’y a t-il de meilleur au monde que la batterie de Tony Williams sur ‘Freedom Jazz Dance’ ?

La meilleure chanson du monde du jour (1)

20 octobre 2009

Les Fleur de Lys battent les Who à leur propre jeu. Reprise jouissive du morceau de clôture du premier album des Who. Je ne peux résister au rythme frénétique de la batterie ni aux guitares sauvages. Chapeau bas.

La ‘vidéo’ est pourrie mais je n’en ai pas trouvé d’autre

Grauzone – Eisbär

8 octobre 2009

Avant de vouloir déjeuner en paix, Stéphane Eicher accompagné de son frère au sein du groupe Grauzone aimait faire de la musique glaciale, dansante et tranchante.

Art Tatum, Ben Webster – The Album

4 octobre 2009

 tatum_webster

 

J’ai acheté ce disque un peu au hasard lors d’une promo à la Fnac. Je connaissais les deux musiciens de nom mais je n’avais jamais rien écouté d’eux. J’ai un peu hésité au départ car je n’écoute que peu de jazz des années 50 (cet album date de 1956), souvent un peu vieillot à mon goût, je lui préfère celui des années 60. Le hasard a cependant bien fait les choses. Cet album est un bijou.

C’est le seul enregistrement qu’Art Tatum (piano) et Ben Webster  (saxophone ténor) ont réalisé ensemble (hormis 4 autres morceaux enregistrés en 1944 pour un show radiophonique). Ils sont  accompagnés ici par Red Callender (contrebasse) et Bill Douglas (batterie). Il est de plus le dernier de Tatum qui décèdera peu de temps après le 5 novembre 1956.  ‘Art Tatum, Ben Webster , The Album’ est considéré par de nombreuses personnes comme l’un des sommets du jazz et la plus belle rencontre entre Art Tatum et un autre musicien soliste. Webster dira lui-même que ‘Night and Day‘, morceau gravé durant cette session est l’un des meilleurs enregistrements qu’il n’ait jamais réalisé.

On doit l’initiative de cette session à Norman Grantz qui a toujours soutenu Tatum et lui donna l’opportunité d’enregistrer aussi bien en solo qu’accompagné d’un groupe. Cependant ici la distinction entre enregistrement solo et enregistrement avec un groupe est assez floue, comment souvent chez Art Tatum à ce que j’ai pu lire. Tatum est bavard, très bavard. Le piano ne s’arrête jamais de vagabonder au grès de ses inspirations. A aucun moment il ne semble cesser de jouer en solo et devenir un simple accompagnateur. Webster le lui fera par ailleurs remarquer sur le ton de la rigolade, lui demandant de lever le pied parce qu’il jouait plus que lui.  Mais magie du jazz, Ben Webster, Red Callender et Bill Douglas parviennent à instaurer un dialogue avec le pianiste tout en lui laissant une totale liberté.

L’alchimie entre Webster et Tatum est fascinante. Le saxophone feutré et chaud de Webster créé un contrepoint merveilleux au piano bouillant et facétieux de Tatum. Les morceaux s’étirent langoureusement et en douceur.  Il s’en dégage un sentiment de bonheur serein et apaisé qui invite l’auditeur à s’y lover et s’y prélasser.

La réédition CD est augmentée de 5 inédits qui peuvent valoir à eux seuls l’acquisition de l’album. Il s’agit des mêmes titres présents sur l’album original mais interprétés par Tatum seul au piano. L’entendre ainsi en solo m’a – comment dire – laissé sur mon séant… Il m’a rarement été donné d’écouter des pianistes seuls au piano. J’ai bien ‘Piano Solo‘ de Thelonious Monk mais il est pour l’instant encore un peu trop hermétique pour moi. Je n’ai pas écouté le ‘Köln Concert‘  de Keith Jarret depuis longtemps. Reste ‘Conversations with myself‘ de Bill Evans que je trouve indigeste. Les enregistrements solos de Tatum m’ont instantanément séduit. Sur la quantité prodigieuse de notes jouées aucune ne semble être gratuite. Elles reflètent toutes le plaisir et la joie de jouer d’Art Tatum. On le devine tel un gamin facétieux s’amusant à faire le pitre, créant sans effort et spontanément une musique d’une beauté tranquille et radieuse. Tatum joue dans les deux sens du terme.  Ses mains parcourent le clavier telles de frénétiques bestioles à 5 pattes et donnent naissance à des éclats de notes qui font et défont les mélodies. Ils se regroupent, s’éparpillent, trottinent, sautillent, virevoltent. Les morceaux sont parsemés de saccades et de soubresauts. Les rythmes glissent et dérapent. Les accords font des pirouettes.

Faites-vous du bien et dépêchez vous de jeter une oreille à la musique d’Art Tatum si vous ne la connaissez pas encore.