Archive for mars 2010

Wooden Shjips – Dance California (Sick Thirst Records, 2006)

29 mars 2010

J’ai un petit faible pour le premier 45T des Wooden Shjips. Ce qui a suivi m’a moins convaincu, abusant un peu trop paresseusement d’une certaine « recette », certes fort agréable vous en conviendrez. J’ai également un peu de mal quand ils chantent. Il faudrait tout de même que j’y jette une oreille à nouveau, on ne sait jamais.

Toujours est-il que Dance California est jouissif. Un petit bijou qui sonne comme si Neu! avait émigré dans un garage en Californie et qu’ils s’étaient abreuvés plus que de raison de Sister Ray. Le groove est irrésistible, hypnotique à souhait. Le son est cradingue, la batterie cogne dure, l’orgue épileptique vrille les tympans tandis que la guitare assène inlassablement un riff bien gras. Le pied !

Oh Putain ! (électrique Miles)

29 mars 2010

Chris Watson – Outside the Circle of Fire (Touch, 1998)

27 mars 2010

Chris Watson a officié au sein du groupe Cabaret Voltaire puis du Hafler Trio avant de se lancer dans une carrière solo. Il se distingue comme preneur de son pour la BBC, ses enregistrements ayant servis à illustrer de nombreux documentaires sur la vie sauvage. Outside the Circle of Fire est son second album pour Touch.

Si jusqu’à présent j’avais chroniqué des albums dans lesquels les field recordings étaient utilisés comme matière première, en revanche sur Outside the Circle of Fire chaque enregistrement est présenté brut, vierge de toute manipulation.

L’univers des sons est merveilleux et Chris Watson est le plus enthousiasment des guides qui soit. Sur Outside the Circle of Fire il se focalise sur les sons d’animaux (mammifères, oiseaux, insectes) dans leur environnement naturel. Certains d’entre eux seraient impossibles à entendre sans l’aide d’un microphone. Les 22 pistes du CD sont autant de zooms sonores.

Avez-vous déjà entendu le ronronnement d’un guépard qui se repose à l’ombre d’un baobab ? Qui d’autre a introduit des micros dans une carcasse de zèbre nettoyée par 9 vautours ?

Chaque son est capté avec une précision incroyable. La moindre variation est restituée de manière fidèle. On assiste à un festival de rythmes, de motifs, de textures et de fréquences d’une très grande complexité et d’une subtilité infinie. Bien des réalisations de musiciens officiant dans le domaine de la musique électronique expérimentale palissent en comparaison.

L’univers sonore dont Chris Watson nous ouvre les portes est d’une richesse à peine imaginable. Chris Watson est un passeur. Il nous invite à porter un regard neuf sur le monde, à retrouver une âme d’enfant. Il nous incite à la curiosité.

Pour les amateurs, le livret fourmille de détails concernant l’équipement utilisé pour capter les sons. De plus, un court texte explique rapidement dans quel contexte chacun d’eux a été réalisé. On y apprend notamment que selon les Masaïs les hippopotames passent leurs journées dans le lit de la rivière à se raconter des blagues et qu’ils en sortent au crépuscule pour rire (le morceau correspondant est en écoute dans la vidéo ci-dessous).

L’écoute de Outside the Circle of Fire pourrait bouleverser à tout jamais ce que vous pensiez savoir de la musique.

Des extraits en écoute ici et .

Captain Beefheart à Cannes

25 mars 2010

Beach House – Teen Dream (Sub pop, 2010)

25 mars 2010

Ce blog est plutôt consacré aux musiques étranges et expérimentales (du moins de par les chroniques, les vidéos sont plus aléatoires) non par volonté d’exclure tout ce qui pourrait sonner grand public, mais pour faire partager et faire découvrir des artistes trop méconnus, peu diffusés et trop souvent restreints à un public ‘spécialisé‘. Je souhaite cependant que Les Oreilles qui Bourdonnent soit également le reflet de mes goûts musicaux dans toute leur diversité. Je n’écoute en effet pas que des musiques ‘bizarres’ mais également beaucoup de rock et de pop.

J’ai véritablement découvert  Beach House il y un mois de cela, en live à la Route du Rock (la vidéo du concert est en ligne ici) . J’en avais évidemment entendu parler sur Pitchfork lors des sorties de leurs deux premiers albums mais ces derniers m’avaient paru assez banals. Au détour de ce même site j’avais également écouté Norway, leur impeccable dernier single.  Bien que magnifique, il ne m’avait cependant en rien préparé à ce qui allait suivre.

Le 19 février dernier je me suis pris une gigantesque claque ; mais alors une claque vraiment monstrueuse. Beach House est avant tout une voix. Une voix chaude, rauque, puissante et sensuelle, celle de l’envoûtante Victoria Legrand. Sur scène la chanteuse dégage une présence magnétique, aussi attirante qu’intimidante. J’étais hypnotisé, sous le charme du début à la fin du concert, pouvant à peine détourner le regard de ce visage insondable caché derrière de longs cheveux rebelles. Derrière son orgue électrique, sa pose était à la fois, assurée et fragile. Nerveuse, presque agressive.  Le concert fut intense, peut être un peu plus pour la gente masculine… L’espace d’une heure j’ai été un papillon de nuit.

Teen Dream est lui aussi superbe. Des morceaux se dégage quelque chose des premières ballades d’Elvis Presley. Pas stylistiquement bien sûr, mais ils ont la même classe infinie, la même aisance, la même facilité à transmettre l’émotion et puis il y a cette même puissance sexuelle dans la voix. Cependant chez Beach House il n’y a pas de candeur, pas de naïveté, mais une noirceur sous-jacente, une élégance vénéneuse. Un poison velvetien coule dans les veines du duo.

Beach House insuffle une évidence et une efficacité pop aux ambiances cafardeuses et oniriques déjà balayées par  les Cocteaux Twins, Mazzy Star ou les Cowboy Junkies sur les Trinity Sessions (album lui aussi enregistré dans une chapelle. Ahh, la superbe reprise de Sweet Jane…). Peu importe les influences. Beach House les transcende toutes. Le groupe a réussi à élaborer un son qui lui est propre et qui est reconnaissable entre mille.

Les morceaux sont instantanément mémorisables. Chaque titre possède un refrain ou un arrangement qui ne vous lâche pas. Comment ne pas être transporté par la mélodie de Lover of Mine, par la tristesse de Real Love ?  Comment ne pas être marqué à vif par Walk in the park dont chaque instant surpasse en grâce le précédent ?

L’attention portée au son est remarquable. Il est souple, chaud et enveloppant. Il faut écouter Teen Dream, seul, le soir, affalé dans des coussins colorés et moelleux à la lumière d’une flamme vacillante. La musique de Beach House a quelque chose de doré et de précieux. Je comprends mieux la pochette du premier album maintenant. Les compositions sont (faussement) simples et l’on imagine l’application maniaque avec laquelle elles ont été élaborées. Cependant la minutie et le soucie du détail ne viennent jamais perturber la beauté et l’évidence fulgurante des mélodies.

Pour faire court, c’est album est sublime.

Ci dessous, un concert issu d’une soirée de poche organisée par la toujours indispensable Blogothèque.

Les vidéos Vodpod ne sont plus disponibles.

Gérard Pondaven, Pange Solemnes (Mouez Breiz, 1958)

25 mars 2010

Après avoir découvert il y quelque temps de cela le label Folways, puis dans un tout autre genre, des petits labels pourvoyeurs de curiosités comme Trunk Records, ma vision de la musique a quelque peu changé. L’acte d’enregistrer et de conserver a pris une importance accrue. Tout comme celui d’écouter.

Il m’arrive d’écouter certaines choses non pas parce que je les aime d’un point de vue strictement musical mais pour le plaisir de la découverte ; par curiosité. A force de prêter une attention de plus en plus grande aux musiques traditionnelles de par le monde je me suis dit qu’il était dommage que je ne m’intéresse pas plus que cela à la musique de ma région, la Bretagne.

Je n’ai qu’un vague intérêt pour la culture bretonne, quoi qu’il tende à se développer ces dernier temps. En règle générale la musique bretonne ne me touche guère, elle aurait même tendance à me faire fuir. Mes connaissances dans le sujet sont donc quasi nulles.

Il y a deux ans de cela j’ai cependant été assez agréablement surpris par un bagad qui avait donné un concert informel au Moulin Vert (un quartier de Quimper) lors du feux de la Saint Jean. La musique m’avait paru étrangement moderne, m’évoquant même une esthétique jazz/rock assez intéressante.

J’ai la chance de vivre dans une région à la culture riche et il me parait de plus en plus dommage de passer à côté de ce patrimoine. Écouter un album de musique bretonne m’est encore totalement impossible. Je me suis donc tourné vers le format 45T.  Celui possède en effet bien des avantages. Tout d’abord il est court. On n’a à se concentrer que 5 minutes tout au plus et on n’est pas obligé d’écouter la face B de suite. De plus il est possible de trouver des 45T pour environs 50 centimes dans la plus part des dépôts-ventes ou des trocs et puces. On a donc le droit de se planter. Si c’est pourri c’est pas grave, on ne s’est pas ruiné. Les pochettes ont en générale un charme délicieusement rétro. De plus j’aime énormément le côté chasse au trésor que j’éprouve à chaque fois que je fouille dans un bac rempli de disques.  J’aime l’excitation ressentie à l’idée de découvrir une pépite cachée.

Je suis tombé sur le 45T des enregistrements de Gérard Pondaven à la Cathédrale de Quimper par le plus grand des hasards. Dans un monde de plus en plus uniformisé, je trouve assez salutaire qu’il existe des productions hyper locales. J’aime également qu’elles se rattachent à des lieux précis, la Cathédrale de Quimper (ma ville d’origine), dans le cas présent. Le jour où j’ai trouvé ce 45T j’en avais également trouvé un autre, celui-là enregistré sur l’orgue de la chapelle de mon lycée (le Likès) ! Je ne sais pas très bien pourquoi mais je ne l’ai pas acheté et je le regrette maintenant amèrement.

Encore novice en matière de musique pour orgue, j’ai été agréablement surpris par les morceaux présents sur ce disque et je les réécoute volontiers de temps en temps. Vous trouvez ci dessous une vidéo (wha, on trouve vraiment tout sur youtube!) qui contient la face A. La face B est tout aussi plaisante et se finit en plus au son des cloches de la cathédrale.

Une voix, une guitare. La classe absolue. Pourra-t-on un jour surpasser cela ?

21 mars 2010

Sunburned Hand of the Man – Jaybird (Qbico, 2003)

20 mars 2010

L’un de mes albums préférés de Sunburned Hand of the Man. A l’origine édité en 2001 par le groupe lui-même sous la forme d’un CDr, il a été ensuite réédité en vinyle (250 exemplaires) par le label italien Qbico. Jaybird est composé de 4 morceaux, 2 par face, chacun édité à partir de 2 concerts. Le premier (face A) enregistré au début de l’année 2001 dans leur loft à Charlestown, le deuxième (face B) en novembre 2000 à Somerville.

Sur Jaybird le groupe fait ce qu’il sait faire de mieux. Il va droit au but et ne se perd pas en chemin en de pénibles et inutiles digressions bruitistes, masturbatoires ou fumeux, voire les 3 à la fois. Lignes de basses groovy, percussions hypnotiques à souhait, guitares cosmiques et incantations hallucinées sous sédatif,  Sunburned Hand of the Man délivre 4 morceaux hautement psychédéliques.

Sur chacun des ces long jams, le groove est magistralement porté par des rythmiques bien huilées. Le groupe excelle dans la construction d’ambiances enivrantes, planantes et tribales. On ne peut que se sentir plongé dans une transe peuplée de visions étranges comme sous l’effet de puissantes substances hallucinogènes.

Un monument du psychédélisme des années 2000.

Un lien pour le télécharger ici : part 1 et part 2

Francisco Lopez – Untitled #228 (ini.itu, 2009)

19 mars 2010

Quand j’ai découvert l’univers des field recordings, je suis rapidement tombé sur le nom de Francisco Lopez. Cependant devant la multitude des sorties du bonhomme je n’ai pas su par où commencer et j’ai laissé tomber. De plus le terme ‘field recordings’ couvre un champs très large d’esthétiques et de contenus et je ne me voyais pas choisir un album totalement au hasard. Ce qui m’a fait me pencher sur ce disque en particulier est simplement qu’il s’agit d’une édition vinyle (chose rare pour Francisco Lopez), limitée à 250 exemplaires (cerise sur le gâteau) dont en plus des extraits sont en écoute ici et . Pour une première rencontre avec l’univers de Francisco Lopez, je dois dire que je suis séduit.

Untitled #228 ne correspond pas exactement à ce à quoi je m’attendais au vu des extraits que j’avais écouté. Cependant cela est une bonne chose, la musque va bien au delà de mes espérances. L’album invite à un voyage de plus excitant. Il m’ouvre de plus de nouvelles perspectives pour explorer un univers sonore dont les limites ne cessent de reculer.

La face A est un gigantesque collage où se donnent à entendre des bribes de discussions, des cliquetis en tous genres, quelques fantômes de mélodies, des enregistrements de rue et des bruits d’insectes… L’enregistrement est semblable à la bande son d’un reportage sans images faisant partager la vie ordinaire (vécue et fantasmée) des habitants d’Indonésie. En effet l’album est entièrement constitué d’enregistrements réalisés en Indonésie par un dénommé Blinhead,  puis manipulés, transformés et assemblés par Francisco Lopez. Ce qui frappe c’est la minutie de la composition ainsi que la clarté et la précision des sons et des textures. Les sons bruts gardent leurs identités propres tout en se mélangeant magistralement les uns aux autres. Certains d’entre eux évoquent les glitchs et textures les plus élaborés de Fennesz sur Plus forty seven degrees 56′ 37″ minus sixteen degrees 51′ 08″

Je suis toujours étonné de la singularité et de l’étrangeté que les sons de notre environnement quotidien acquièrent quand ils sont enregistrés et isolés avec une précision chirurgicale et donnés à entendre dans un contexte différent.

La face B est plus atmosphérique et évoque un morceau d’ambient sombre, genre dans lequel le label Type excelle. Francisco Lopez nous invite à une lente dérive cauchemardesque et vaporeuse réalisée à partir d’enregistrements de gamelans. Cette musique spectrale donne à entendre des tintements stridents et éthérés sous lesquels rampent de puissants drones. Elle pourrait parfaitement servir de B.O. à n’importe quelle scène de film d’horreur à l’ambiance onirique et mystérieuse.

Un véritable travail de composition pour lequel les matières premières ne sont pas des notes mais des enregistrements sonores réalisés en plein air au plus près de la réalité quotidienne. Jetez-y une oreille.