Le nouvel album de Vibracathedral Orchestra a été enregistré à Londres et Cambridge les 26 et 27 août 2007. Il est publié sur Manhand, le label de Sunburned Hand of the Man.
Sur cet album, pas de nom de morceaux mais une unique composition divisée en Part one et Part two répartie de part et d’autre des faces du vinyle. La première face est divisée en trois « mouvements ». Cela commence sur les chapeaux de roues avec des chants d’oiseaux associés à des larsens furieux et à un harmonium afin de former un dense magma sonore qui se transforme progressivement en un capharnaüm extatique. Brusquement le rythme s’affole. Les percussions s’emballent, le rythme devient effréné et des explosions de larsens et de saturations éclatent. La musique se transforme en une tornade sonore. On se trouve plongé au coeur d’un ouragan de décibels traversé de bruits électriques. On entre en transe enivré par les nappes d’orgue qui se superposent au magma sonore. La musique atteint petit à petit une dimension paroxysmique. La tension retombe ensuite petit à petit, on reste abasourdit encore sous le choc. La furie laisse place à une troisième partie où se fait entendre un orgue planant qui se superpose au tapis créé par l’harmonium, les percussions étouffées et le souffle rauque d’un saxophone.
La face B s’ouvre par ce qui semble être des instruments à vent aux sonorités orientales (Il n’y a aucune indication concernant les instruments utilisés. Je peux uniquement dire que pour moi cela sonne, ou Vietnamien, ou Pakistanais, ou Tibétain. Vous devinez dès lors que je n’y connais rien…) A ces instruments à vent s’ajoutent des orgues et des percussions au rythme plus lent. La musique se densifie et s’organise progressivement. Contrairement à la face A, elle est ici plus morbide dans un style assez proche de celui de Silvester Anfang. Il s’en dégage quelque chose d’obscure et de malsain. Soudain un mur de bruits et de saturation s’abat brutalement avant que ne rugissent des guitares abrasives et que des percussions ne martèlent des rythmes hypnotiques. Larsens et chants d’oiseaux s’unissent à nouveau pour recréer ce qui avait été commencé sur la face A mais cette fois-ci avec une brutalité inouïe. Décharges de décibels chauffées à blanc, chapes de larsens, et sons saturés lacèrent les tympans. L’intensité est à son comble. Le bruit est assourdissant. C’est comme regarder fixement une lumière blanche aveuglante.
Il est nécessaire d’avoir l’oreille entraînée pour ne pas voir dans ce disque qu’un déluge sonique inécoutable. La première écoute a été assez éprouvante pour moi. Je ne découvre que maintenant la beauté qui s’y cache. Il faut du temps pour s’habituer à l’intensité sonore et réussir à creuser le magma pour en déchiffrer les strates. Passé ce temps d’adaptation, ce disque est absolument sublime. Un album d’une grande beauté. Il incarne à mon sens la descendance du free jazz tel que John Coltrane, Pharoah Sanders et Albert Ayler le jouait dans les années 60. Bien évidemment, comparer un obscure groupe de musque expérimentale anglais aux géant du free Jazz Américain va sûrement faire hurler quelques personnes (pour peu que quelqu’un lise cet article). L’album The Momentary Aviary partage avec ses illustres prédécesseurs, la même dimension spirituelle. L’esthétique du cris, ou du bruit dans le cas présent, ne vise pas à la destruction mais représente bien au contraire la rage du vivant, l’énergie primale créatrice de vie et de beauté. De cette violence et de cette intensité ne se dégage aucune énergie négative, mais un sentiment de béatitude et complétude totale. Il s’agit là du bruit d’une force créatrice exacerbée : du bruit du Divin. Tout comme les maîtres du free jazz spirituel, le Vibracathedral orchestra, se plait à mélanger les sonorités de différentes cultures, voire même ici, sonorité électriques, acoustiques et naturelles (chants d’oiseaux). Les frontières sont abolies et la musique invite de toute son énergie à une fête et à une joie universelle.
Ecoutez un extrait de l’album ici ou regardez une vidéo qui offre un bel aperçus de ce que le groupe peut faire sur scène, là
Vibracathedral Orchestra, The momentary Aviary, Manhand 96, 2008. Vinyle limité à 600 exemplaires numérotés, avec pochettes avant et arrière collées + poster inclus.